samedi 6 septembre 2014

Il faut sauver la figue de Kabylie

Photo 185

Le village de Lemsella, dans la commune d’Illoula, célèbre la 8éme édition de la fête de la figue. Cette grande fête qui est de plus en plus populaire a débuté avant-hier jeudi, et prendra fin aujourd’hui, Samedi. Nous nous sommes rendus sur place.

 

Une chaleur torride nous accompagne tout au long des plaines de «Boubhir», avant d’atteindre Tabouda, le chef-lieu de la commune d’Illoula, située à 60 km à l’est de Tizi Ouzou. Pour rallier Lemsella, village où se déroule la 8ème édition de la fête de la figue, il faut emprunter une route montagneuse et serpentée. Des virages à 360°, mais des paysages panoramiques à couper le souffle. Au bout d’un quart d’heure de route, le petit village de Lemsella, adossé à une montagne, juste au-dessous du mont Chellata, s'expose enfin à nos regards.

Les rues étroites du village sont bondées de monde : jeunes et moins jeunes, hommes et femmes y déambulent à travers les ruelles de ce petit village kabyle pour découvrir les étales d’une vingtaine d’exposants, venus des quatre coins du pays. Objets traditionnels, mets de terroirs, objets artisanaux et autres produits traditionnels sont exposés aux centaines de visiteurs qui s’y trouvent en ce jeudi matin. En somme, les artères de Lemsella sont devenues, en l’espace de cette manifestation culturelle et économique, un véritable miroir d’une Algérie plurielle où plusieurs régions sont représentées. La cérémonie d’ouverture est marquée par allocution des représentants des autorités locales et de la wilaya. Des élus et des représentants de l’administration se sont relayés au pupitre pour louer les efforts des habitants de ce petit village, mais aussi afficher leur volonté de leur prêter main forte. Juste après les discours et les promesses, une cohorte de femmes, habillées en robes kabyles,  lancent un tonnerre de youyous, comme pour souhaiter la bienvenue à tous les visiteurs. Accompagnée munis  d’un «Bendir», ces femmes ont fait le tour de toutes les ruelles, en chantant des airs traditionnels.  La fête s'est officiellement implantée dans le village.

Photo 188

Sous le slogan « terroir et moralité »

Bien au delà de l’aspect économique et culturelle que revêt cette manifestation, la consommation de la figue dans cette contrée est soumise à un code qui reflète la grandeur des âmes de la population qui la peuple. Le slogan retenu par les organisateurs pour l‘édition de cette année est «Terroir et moralité». « Chez nous, dans le temps,  on ne peut pas cueillir des figues avant l’appel du comité des sages pour annoncer l’autorisation de la cueillette de figues», confie Hamel Mohamed, 1ervice président de l’association Tighilt, organisatrice de cette fête. «Chaque année, vers la fin du mois d’août, a lieu l’appel des sages pour autoriser tous les citoyens de cueillir les figues, une fois que celles-ci sont mûres. Les figues deviennent mûres plus vite dans le coté bas de la montagne, ce n’est pas le cas en haut de la montagne. Donc, à travers ce rituel les villageois habitant du coté bas, ou sur les hauteurs de la montagne, auront le droit de savourer ce fruit en même temps.  Ainsi, tous les habitants de la région auront à consommer ce fruit dans un esprit de communion et de partage", nous explique encore ce jeune responsable d’association dont l'âge ne dépasse pas les vingtaines. Ce rituel qui s’appelle  «Thamuqint » est toujours de mise dans cette région. «A travers le thème que nous avons retenu pour cette année, nous voulons réhabiliter cette tradition qui tend à se perdre de nos jours », nous dira encore notre interlocuteur.

Un bol d’oxygène pour le village

Ce petit village de Lemsella est sorti de l’ombre depuis l’instauration de cette fête, au début des années 2000. A chaque édition, c’est tout le village qui se mobilise pour réussir ce rendez-vous populaire et festif. Les visiteurs qui viennent des différents coins du pays gardent une excellente image de cette contrée très accueillante et chaleureuse. Des subventions sont accordées par l’APW de Tizi Ouzou, et l’APC d’Illoula à chaque édition sans oublier à de nombreux sponsors qui n’hésitent pas à mettre la main dans la poche pour aider à la réussite de cette fête. Mais le but principal de cette manifestation n'est pas d'ordre commercial. Les organisateurs se sont donnés le pari de réhabiliter ce fruit emblématique, et la plantation des figuiers qui tend à disparaître des champs de la Kabylie. «Avant, je ne connaissais pas toutes ces variétés de figues. Je connaissais une ou deux, c’est tout. Mais depuis l’instauration de cette fête, je sais qu’on a une vingtaine de variétés et chacune est différente des autres" s'exclame Ali, un jeune habitant du village selon lequel, grâce à cette fête, les plantations de figues autour du village ont connu un boom exceptionnel.

figue kabylie

La sonnette d’alarme

Cependant, les organisateurs de cette manifestation ne sont pas tant rassurés pour l’avenir, « cette célébration est une occasion d’exposer les problématiques de cette culture en déclin. L’enjeu est de perpétrer ces moments de joies, mais le risque est réel notamment si les autorités, la société civile et les opérateurs économiques ne réagissent pas. La figue, à l’image des autres produits du terroir,  doit trouver sa place dans la chaîne de développement et les autorités sont mises devant leurs responsabilités. En ce sens, plusieurs projets ont été proposés par les organisateurs ; une pépinière de figuier, une unité de séchage et de conditionnement de figuiers, mais ces projets qui restent encore sans suite", soulignent les membres de l’association Tighilt, sur les prospectus distribués sur place. Leur cri va-t-il être écouté ? Seul l'avenir nous le dira...

Arezki IBERSIENE

The post Il faut sauver la figue de Kabylie appeared first on Algérie Focus.



Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source





Source : Algérie Focus
Date : September 06, 2014 at 10:38AM

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire