Nous sommes en 2015. Mais, nous sommes en Algérie. Le pays où un seul câble véhicule 80 % de la bande passante nécessaire à l'utilisation du web pour un peuple de 40 millions d'âmes. Le pays où un seul opérateur, en l'occurrence Algérie-Télécom, fait la pluie et le beau temps sur le marché de l'Internet.
En 2015, tout un peuple n'a ni la possibilité de choisir son propre opérateur ni celle de souscrire à l'abonnement qui lui convient le mieux. Tout dépend d'un seul opérateur. La connexion Internet est pour ainsi dire la "propriété privée" d'Algérie-Télécom. Pourquoi et au nom de quelle logique ? Personne ne le sait. Ou plutôt personne n'ose remettre en cause la position monopolistique de "l'opérateur historique". Et Pourquoi donc ? Parce que le monopole est une notion ancrée au plus profond de nous-mêmes. Le monopole relève d'une mentalité à la peau dure qui prospère dans chacun de nos gènes.
Comme Algérie-Télécom, des monopoles existent dans de nombreux autres secteurs de la vie des Algériens. Air Algérie monopolise le transport aérien. Retard, mauvaise qualité de service, cherté excessive des billets d'avion. Et en dépit de tous les reproches faits à Air Algérie, son monopole reste inébranlable. Il y a, certes, des compagnies aériennes étrangères qui desservent à partir de l'Algérie diverses destinations, mais, par la magie d'une règle tacite, elles sont contraintes de s'aligner sur les prix affichés par Air Algérie. Au niveau national, Tassili Airlines demeure encore si insignifiante qu'elle ne peut prétendre à concurrencer Air Algérie.
Depuis leur naissance et jusqu'à leur mort, les Algériens ne connaissent qu'Air Algérie. Aucune autre alternative n'a droit de cité. Dans l'énergie, Sonatrach et Sonelgaz détiennent aussi un monopole que tout le monde justifie au nom de la souveraineté nationale. Toutefois, ces "souverainistes" ne trouvent aucune logique économique pour expliquer les énormes subventions, évaluées à plus de 15 milliards de dollars, accordées par le Trésor Public à ce secteur de l'énergie. Des subventions qui creusent le déficit budgétaire de notre pays et menacent tout bonnement ses équilibres financiers. Et si Sonatrach laissait davantage de place aux investissements étrangers pour financer les travaux d'exploration et d'exploitation dans le secteur pétrolier, cela ne permettrait-il pas à l'Algérie de souffler en ces temps de disette financière ? Et si nous lancions un véritable débat sur un fonctionnement différent de la distribution de l'électricité et du gaz dans notre pays, afin de réduire les 1,54 milliards de dollars de subvention accordée, chaque année, à Sonelgaz pour maintenir un équilibre boiteux ?
Détrompons-nous. Ce débat n'est pas encore envisageable pour la simple raison que le monopole est un trait culturel qui distingue nos dirigeants et notre société du reste du monde. En Algérie, le président détient le monopole de la décision politique fût-il malade ou diminué physiquement. Le parlement n'est qu'un artifice cosmétique. Idem pour le sénat. Ce ne sont que des institutions, ou plutôt des coquilles vides, que le Chef de l'Etat fait et défait au gré de ses humeurs. L'opposition est à peine tolérée pour les besoins de façade démocratique. Menacée, diabolisée, harcelée, son existence même prive nos gouvernants de sommeil. La presse est contrôlée et assujettie au diktat économique. Même pour régenter les esprits, on recourt aux monopoles.
Une seule religion a les faveurs du régime. C'est l'Islam. C'est la religion officielle, celle de l'Etat. Point barre. On peut être chrétien, bouddhiste, athée, mais on n'a pas le droit de l'assumer publiquement. Sinon, la société, avec la complicité active de l'Etat, nous excommunie. La langue arabe bénéficie aussi de cette situation de monopole. Tamazight commence à peine à creuser quelques sillons dans l'unicité linguistique, après de rudes et violents combats. Et celui qui veut s'attaquer au statut officiel de la langue arabe devient le harki, l'ennemi téléguidé de l'étranger, la virus qu'il faut anihiler.
Du lavage des cerveaux de la population jusqu'à la gestion de l'économie, le monopole est une véritable philosophie de pouvoir. Et tant que ceux qui nous dirigent ne changeront pas cette mentalité obsolète, nous pataugerons éternellement dans le cloaque du sous-développement et nous serons reliés au monde qui avance par…un seul et unique câble.
The post Changez votre mentalité du monopole ! Par Abdou Semmar appeared first on Algérie Focus.
Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source
Source : Algérie Focus
Date : October 26, 2015 at 04:21PM
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire