mardi 20 octobre 2015

Métiers/ Pourquoi les jeunes ont tort de bouder l’artisanat

Artisanat reportage

Au gré des allées des pavillons du Palais d'Expositions d'Alger, on peut rencontrer, depuis le 15 octobre en cours, des artisans algériens talentueux, sympathiques, avenants, qui n'hésitent pas à vous expliquer l'histoire de leur savoir-faire ainsi que les raisons qui les ont poussés vers ces métiers fantastiques, mais, malheureusement, boudés en Algérie.

Le Salon est l'occasion d'un dialogue entre les artisans et le public, mais aussi entre les artisans, originaires de toutes les régions du pays, eux-mêmes. Cette année, 580 artisans algériens étaient présents ainsi que 102 étrangers. La Palestine était l'invitée d'honneur. Force est de constater que l'artisanat algérien est riche et diversifié. Dans certains ateliers de haute couture, à l'instar de la boutique Fil-Art, située à la rue Claude Debussy, à Alger, ce sont des robes constantinoises, chaouies, algéroises notamment, qui sont présentées avec beaucoup d'élégance.

Les jeunes algériens snobent l'artisanat 

Le Salon n'est pas seulement une vitrine de l'artisanat algérien, c'est aussi une vitrine culturelle. Les différents artisans présents ont à cœur de montrer les spécificités et les savoirs-faire de leurs terroirs. Ils sont, bien souvent, chaleureux, joyeux, et plutôt optimistes quant à l'avenir de leurs métiers. Mais un problème revient tel un leitmotiv : le manque cruel de main-d'œuvre. Un artisan de Tlemcen, Choukri Benaissa, dont le stand est orné de tissus magnifiques, évoque les difficultés rencontrées à recruter des jeunes sérieux.  "Il manque des gens qualifiés, il est difficile de trouver de bons stagiaires dans le domaine du tissage car les jeunes d'aujourd'hui ne sont plus aussi enthousiastes qu'avant", déplore-t-il.  Mais comment expliquer le manque de motivation des jeunes pour ces métiers si valorisants ?

Pour certains artisans, c'est le message global véhiculé sur les métiers de l'artisanat, qui est négatif. Pas seulement par la société, mais par certains offices chargés, pourtant, de promouvoir le secteur. « Les chambres des métiers ne font pas bien leur travail", regrette M. Bellazag, qui travaille, lui-aussi, dans la haute couture, "alors qu'elles sont chargées de promouvoir notre profession, de donner une image positive de l'artisanat aux plus jeunes", regrette-il. Bien que le savoir-faire se transmette parfois de père en fils, comme ce fut le cas du tisserand de Tlemcen, M. Benaissa, l'Etat propose aussi de nombreuses formations, rapides, gratuites, et cela dans une multitude de variantes de l'artisanat, pour offrir aux jeunes un métier et la possibilité d'entreprendre. M. Belazzoug, par exemple, a appris l'art de la céramique à l'âge de 17 ans en apprentissage, et a créé son propre atelier quelques années plus tard. « C'est beaucoup de travail », raconte t-il, « mais c'est tellement épanouissant qu'on ne compte pas ses heures ».

"Si les jeunes étaient sérieux et motivés..."

Les petites tasses bleues, sur le rebord d'une des tables qu'il présente, sont superbes, et l'on devine en effet l'important volume de travail nécessaire à leur création. La formation en apprentissage est la plus fréquente : « mes jeunes apprentis font une journée de formation par semaine et le reste du temps, ils travaillent avec moi », explique t-il. Le travail pratique constitue 80% de la formation qui, dans le domaine de la céramique, "dure un an, si les jeunes formés sont sérieux et motivés par ce travail, qui est bien plus qu'un simple métier".

C'est avec beaucoup de passion et d'émotion que cet artisan parle de son atelier et de son art, mais il reste lucide quand aux difficultés rencontrées par les jeunes pour lancer leurs entreprises : "Au début, pour moi c'était un peu difficile, mais il faut persévérer pour que cela marche", confie-t-il. Notre interlocuteur ne manque pas de regretter les nombreux jeunes qui abandonnent dés qu'un premier obstacle apparaît sur leur route. Les salons tels que celui organisé à Alger, reconnu sur le plan international, offrent d'excellentes vitrines à des artisans qui bien souvent peinent à promouvoir leur travail. M. Belazzoug les écument, chaque année, les salons, autant en Algérie qu'en Europe : "Je suis souvent rendu en France, à Marseille, à la Rochelle notamment, ce sont toujours de bonnes opportunités pour mettre en avant mes pièces".

Des formations gratuites et des bourses 

Avec un taux de chômage particulièrement élevé, notamment chez les 18-25 ans, il est étonnant que les jeunes générations ne se tournent pas massivement vers ces métiers prometteurs qui, en plus de proposer de bonnes perspectives financières, offrent la possibilité d'acquérir un véritable savoir-faire technique, valorisant et gratifiant. Le ministère de la Formation et de l'Enseignement Professionnels, présent au salon, évoque les nombreuses formations et possibilités d'apprentissage offertes aux jeunes : « Non seulement les formations sont gratuites, mais dans beaucoup de cas, le ministère alloue des bourses aux stagiaires et aux apprentis ». Durant une période qui varie entre six et 30 mois, ces formations ne demandent que du sérieux et de la motivation, et le niveau scolaire a peu d'importance.

Au-delà de la dimension commerciale de ce Salon, il permet aux jeunes générations de découvrir un métier et un « art » de faire. Ces jeunes algériens qui rêvent d'exercer des boulots précaires et mal payés en Europe, en Asie et ailleurs, auront beaucoup à gagner s'ils partent à la rencontre de tous ces artisans talentueux. Ces derniers peuvent leur offrir un savoir-faire qu'ils ne trouveront pas aisément dans une autre région du monde.

Reportage réalisé par Tahar. S 

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Source : Algérie Focus
Date : October 20, 2015 at 02:01PM

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